Si même les arbres meurent, Jeanne Benameur, Thierry Magnier

Le récit ? Il tient en quelques phrases :

Mathieu et sa petite sœur Céline sont à l’hôpital – et leur maman, Dominique, au chevet de son mari Adrien. A la suite d’un accident ( lequel ? On ne le saura pas et c’est sans importance ), Adrien est dans le coma. Entre la vie et la mort.

Mathieu et Céline attendent ; ils ne vont plus à l’école, parfois ils entrent dans la chambre de leur père pour le voir, il est pâle, immobile ; ils rentrent le soir avec leur maman pour dormir – c’est exceptionnel – dans la même chambre.

Les jours passent, identiques.

A l’hôpital, les enfants s’inventent un autre nom et un autre univers : ce lieu devient un espace plein d’embûches que le Capitaine ( Mathieu ) du Vaisseau Blanc et Petite Montagne ( Céline ) parcourent, à la recherche de Grand Aigle ( leur papa, qui aime et connaît bien la montagne ). Ils quittent l’étage ( la zone des Immortels ) et évitent celles des Passagers ( les malades, les visiteurs, qui vont et viennent )

L’état d’Adrien empire, comme essaie de le faire comprendre à Dominique l’infirmière Paula.

Un jour, les enfants parviennent au sous-sol, où ils font la connaissance d’un balayeur africain et philosophe : Issaïa, un homme sage et doux qui les prépare au pire, et leur confiera les secrets du cœur. Et un talisman…

On l’aura compris : ce récit, destiné aux jeunes adultes, est grave. Et beau.

Ames sensibles s’abstenir ? Comment savoir ?

Ceux qui ne connaissent ni Jeanne Benameur ( dommage ! ) ni ses récits ( mais là, ça peut s’arranger ! ) peuvent aborder Si même les arbres meurent en sachant qu’ils auront une bonne idée de son style, de son imaginaire, de son humanité…

Même si l’on peine à retenir ses larmes, on a l’impression que c’est là un récit nécessaire, dont les métaphores nous éclairent – et qui, je crois, peut aider un enfant ou un adolescent à surmonter la disparition d’un proche.

Jeanne Benameur aborde un sujet grave sans jamais heurter le lecteur – et encore moins l’abreuver d’adjectifs larmoyants. Elle fait se poser de vraies questions à ses enfants-héros démunis, à l’épouse désespérée – mais aussi à Sylvie, l’institutrice désemparée qui aimerait que les enfants retournent à l’école ; à Fabien, le copain de Mathieu, qui lui envoie des lettres et s’étonne de ne pas avoir de réponse…

Jamais l’auteure ne prend parti, jamais elle n’explique ou ne livre de clés. Elle n’évoque ni Dieu ni la prière, mais son récit est pétri d’une fabuleuse humanité. Non : elle se contente d’interroger, elle nous oblige à nous poser les ( bonnes ) questions.

En sachant que seuls l’amour et le souvenir peuvent nous livrer, qui sait, des ébauches de solutions.

Lu dans sa version d’origine, un format moyen très élégant et haut, à la manière des Actes Sud.

CG

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