Garance ( la narratrice ) et sa sœur aînée Lola, récupérée in extremis à la gare de Chateauroux, partent à un mariage de famille dans une voiture conduite par leur frère Simon.
Mais le ( trop ) gentil Simon a une épouse… un peu fat et assez psychorigide : Carine : elle est pharmacienne mais « préfère qu’on dise pharmacien, donc elle a une pharmacie mais préfère qu’on dise une officine. » Et « elle vend surtout des crèmes raffermissantes pour les fesses et des gélules au carotène parce que ça rapporte plus, mais préfère dire qu’elle a optimisé son secteur para. » Bref, Carine va gâcher tout le voyage.
Adepte de l’aseptie totale, elle « tourne longtemps son sucre sans sucre dans son café sans caféine » et évite la piscine « où tous les gamins se donnent la main avant de s’échanger leurs mycoses. Vivre, pour elle, est une occupation harassante.» Tout le contraire de Garance, un rien décontractée, célibataire et sans enfants, pas du tout prête à filer le parfait amour avec « un bon bougre. Carré. Simple. Fourni avec les piles et le livret de Caisse d’Epargne. »
A peine arrivés, les deux sœurs et le frère décident de faire faux bond à la cérémonie : ils s’éclipsent en douce pour rejoindre le cadet, Vincent, devenu un peu malgré lui le guide insouciant et fantaisiste d’un vieux château « perdu au fin fond de la campagne tourangelle. »
C’est l’occasion pour la fratrie enfin réunie ( sans Carine ! ) de retrouver le goût de l’enfance, de l’improvisation – et d’évoquer le temps où leurs parents ( divorcés depuis ) étaient heureux. Les quatre complices finiront d’ailleurs par assister à un autre mariage… beaucoup moins collet monté que celui auquel ils étaient conviés !
Si vous lu Ensemble, c’est tout et même La Consolante, peut-être L’échappée belle… vous a échappé ? Eh bien c’est vraiment dommage ! Parce que ( vous l’aurez vite compris ) ce n’est pas le sujet qui importe ici, mais les portraits au vitriol et un style sec, débridé, qui déborde d’invention et de fantaisie.
Anna Gavalda a débuté chez Bayard avec 35 kilos d’espoir. Très vite, elle est passée chez les adultes, à l’image de Daniel Pennac, Philippe Delerm et Marie Deplechin ( j’en passe ! ) – mais elle a gardé la jeunesse, la fronde et la gaieté des préadolescents !
L’Echappée belle est un vrai feu d’artifice, un récit qui regorge de trouvailles de style, d’effets ( et de références ) littéraires et de jeux de mots. Un plaisir de lecture garanti, pas une seconde, pas une ligne d’ennui – même si, après cent pages ( sur 160… mais on en redemande ! ), on serait presque groggy par l’accumulation de tant de jeux d’esprit.
Lu dans sa version d’origine, un superbe ouvrage de format poche aussi beau et soigné qu’un grand format ! Un vrai bijou, à tous les points de vue – 10 euros de pur bonheur !
CG