1967, en Chine – et en pleine révolution culturelle, le règne des fameux Gardes Rouges ...
La jeune astrophysicienne Ye Wentje assiste à l’exécution de son père, un savant accusé de déviationnisme scientifique. En mesure de rétorsion, elle-même est exilée à vie dans une base militaire isolée ( Côte Rouge ) dotée d’un radiotélescope chargé de piéger d’éventuels signes d’une civilisation extraterrestre...
Trente-huit ans plus tard, le professeur Wang Miao, spécialiste en nanotechnologies, est soupçonné par Shi Kiang, un officier de police grossier, de se livrer à des recherches douteuses. De fait, Wang Miao participe à un jeu de fantasy scientifique très étrange, Les trois Corps, qui met en scène une civilisation en proie à des cataclysmes climatiques incontrôlables, cataclysmes dus à la présence de trois soleils dont la courses est apparemment erratique. Un phénomène qui oblige les habitants à se « dessécher » pendant de longues périodes pour survivre.
Entre-temps, on retrouve Ye Wentje qui a bel et bien pris contact avec une civilisation extraterrestre, les Trisolariens, dont la Terre pourrait bien être le dernier refuge. Une Terre en proie à de telles contradictions et de tels conflits que la jeune scientifique a trahi les siens en livrant sa planète à une civilisation en danger nettement plus évoluée que la nôtre.
De fait, un stupéfiant compte à rebours semble lancé... et des phénomènes incompréhensibles se multiplient sur Terre, faisant douter les savants... de la Science elle-même.
Des phénomènes dont la justification n’est livrée que dans les toutes dernières pages, au moyen d’explications scientifiques dignes de Stanislas Lem ( dans Feu Vénus ) sur « un monde microscopique à onze dimension » et sur « la structure profonde de la matière ».
Mes lecteurs me reprochent parfois d’en dire trop. Pour le coup, le résumé ci-dessus en livre beaucoup moins que... la 4ème de couverture de ce roman de SF !
Ma première surprise, en lisant cet ouvrage offert par mon Webmaster Patrick Moreau ( qui en sait autant que moi sur la SF, et même davantage ! ) a été de constater qu’il avait été publié par Actes Sud.
En effet, la SF n’est pas vraiment le genre de la maison ; et on se serait plutôt attendu à trouver Le problème à Trois Corps publié en Ailleurs et demain, chez Robert Laffont.
Mais voilà : ce roman est très... réaliste.
Et l’univers de ( fausse ) fantasy du « Jeu des Trois Corps » a bel et bien une réalité sur un monde proche de nous, dans le triple système stellaire d’Alpha du Centaure.
Non seulement ce récit ne se déroule pas ( pour l’instant ) dans le futur, mais surtout, il plonge le lecteur ( grâce au jeu éponyme des Trois Corps ) au cœur de l’histoire de la Chine – oui, c’est une véritable encyclopédie, et les notes en bas de page se succèdent pour aider le lecteur peu familiarisé avec la civilisation chinoise ! Un coup de chapeau en passant au traducteur, Gwennaël Gaffric !
Autre caractéristique qui le différencie de la SF actuelle : les nombreuses références ( souvent historiques ) à la physique, l’astrophysique, les mathématiques... et l’informatique !
On est là dans un univers de hard science qui pourrait dérouter et rebuter celles et ceux qui ne sont pas familiarisés avec les bases de toutes ces sciences...
A contrario, le jeu Les trois corps entraîne le lecteur dans des péripéties historiques qui mêlent de façon très inattendue les sciences, l’histoire... et l’imagination scientifique ( à la mode chinoise ! )
Que penser de ce roman ?
Il est original et déroutant, même si sa trame peut se résumer à un thème très classique de la SF ( que j’ai moi-même utilisé en 1976 dans Le satellite venu d’ailleurs ! ) : la Terre reçoit des messages venus d’une civilisation extraterrestre – thème que le cinéma a souvent traité, notamment avec Contact, le film de Jodie Foster.
Mais cette « révélation » ( faite dès la 4ème de couv ) n’apparaîtra que dans la deuxième moitié de ce roman, qui est en réalité... le premier tome d’une trilogie, la suite étant censée se dérouler avec l’arrivée ( ? ) sur Terre des Trisolariens dans quatre siècles et demi. A condition que les Terriens n’aient pas trouvé d’ici là une parade pour contrer cette invasion extraterrestre.
Le lecteur pourra être également gêné par les allers-retours que le narrateur lui impose, en s’intéressant de façon alternée à Ye Wentje, son époux, leur fille – mais aussi et surtout à Wang Miao, qui cherche à percer la nature de l’infiniment petit – et là, on aborde la cosmogonie la plus audacieuse....
Bref, il s’agit là d’un thriller de SF exigeant et haut de gamme, qui flirte à la fois avec le polar, le récit historique et l’essai scientifique.
Né en 1963, Liu Cixin semble être devenu l’étoile montante de la SF chinoise.
Il a remporté à neuf reprises le Galaxy Award ( le Hugo chinois ) et... le Prix Hugo en 2015.
Lu dans son unique version, un superbe grand format à la couverture noire dotée d’une illustration vert sombre très cinématographique.
Papier et typographie impeccables.
CG
1 De Gwennaël Gaffric -
Bonjour,
Je tombe par hasard sur votre chronique en surfant sur le Net.
Merci pour ces gentils mots.
Comme votre nom me disait quelque chose, j'ai découvert avec amusement et nostalgie que j'avais lu (et beaucoup aimé) Coups de théâtre et L'Ordinatueur étant jeune. J'en garde d'excellents souvenirs, et me prépare à découvrir d'autres romans de votre plume.
Gwennaël
2 De Christian GRENIER -
Merci, Gwennaël ! Ravi d'e votre fidélité - et à bientôt, par blog interposé !