Colette, une certaine France, Michel del Castillo, Stock

Colette a baigné mon adolescence ; le personnage et sa vie m’ont toujours fasciné autant que son style et son œuvre.

Michel del Castillo n’est pas le premier à évoquer le destin de cet écrivain hors norme. Son ouvrage n’a d’ailleurs ni l’allure ni l’ambition d’une biographie, tâche déjà effectuée ( entre autres ! ) par Jean Chalon, Geneviève Dormann, Mona Ozouf, Claude Pichois et Alain Brunet… puis par Maurice Goudeket ( son dernier mari ) et Colette elle-même !

Attentif à la famille de l’écrivain et à ses origines, Michel del Castillo s’attache d’abord à sa mère, la fameuse Sido, dont il brosse un portrait haut en couleur : maîtresse femme, Sido a eu sur sa fille une influence considérable, lui enseignant la laïcité, l’indépendance et la nature. Cent pages lui sont consacrées… soit le quart de l’ouvrage ! Ensuite, c’est à Willy que Michel del Castillo s’intéresse, nuançant un portrait que les biographes ( et Colette elle-même ) ont trop souvent peu flatté. Noceur impénitent, père d’un bébé ( qu’il avait eu de sa maîtresse ) que la famille de Colette a recueilli, Willy n’a pas forcé la jeune Gabrielle à l’épouser. Sido et elle auraient été plutôt soulagées de cette union quasi inespérée avec ce dandy riche et célèbre !

Une troisième partie s’attache à réhabiliter Missy, cette fameuse Duchesse de Morny dont Colette, on le sait, partagea un temps la vie. Une Missy dont la gentillesse et la générosité émeuvent d’autant plus le lecteur que Colette, après avoir bénéficié de ses largesses, l’abandonna à la fin de sa vie. Dernière fille du Duc de Morny ( le frère utérin de Napoléon III ), Mathilde, dite Missy, dut à Sacha Guitry de ne pas mourir dans une trop grande misère.

L’auteur nous décrit ensuite la fille de Colette ( Colette… dite Bel Gazou ), qu’elle eut de son deuxième mari Bertrand de Jouvenel, que Michel del Castillo connut et fréquenta, même s’il apprécia peu l’admiration inconditionnelle qu’elle voua toute sa vie à ses parents, bien qu’ils aient abandonné son éducation à u ne nurse anglaise, comme c’était la coutume dans la grande bourgeoisie de l’époque. Enfin, nous apprenons par le menu dans quelles circonstances notre écrivain national, la cinquantaine bien sonnée, déniaisa à l’âge de 17 ans… Bertrand de Jouvenel, le fils de la première femme de son deuxième mari. Une liaison qui dura cinq ans.

Sévère avec certains de ses prédécesseurs ( il déconseille de lire Michèle Sarde ), le biographe l’est aussi envers Colette elle-même, dont il juge certains ouvrages très mineurs.

Et si Colette reste le grand écrivain que l’on sait, le portrait intime qu’il en brosse nous dévoile une femme rouée, intéressée, égoïste et ingrate, soucieuse avant tout de préserver son plaisir, ses intérêts et une notoriété qu’elle passa la fin de sa vie à peaufiner, pour accréditer l’image de « la bonne dame du Palais Royal ».

Pour l’anecdote, et afin que l’on comprenne mon attachement à Colette, j’avoue avoir été stupéfait d’apprendre, il y a une dizaine d’années… que sa maison était à vendre ! Quoi ?  Ainsi on pouvait acheter pour 300 000 euros la maison de Claudine et son jardin d’en bas, et son jardin d’en haut ? J’ai presque envisagé de vendre notre maison pour me transporter à St Sauveur en Puisaye et devenir le dépositaire d’un lieu à mes yeux mythique - que je connais pour l’avoir visité.

Qu’on se rassure : une association s’en est chargé, et la maison serait – ouf ! – transformée en musée.

Lu dans la belle « collection bleue de chez Stock, ornée d’une jaquette d’époque avec une photo dont Michel del Castillo est l’auteur !

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