1699, au Caire ( Egypte ).
Louis XIV fait savoir au consul, M. de Maillet, qu’il souhaite établir le contact avec le Négus, souverain d’Abyssinie. Or, le pays est impénétrable : peu de ceux qui s’y sont risqués en sont revenus. Et les Jésuites qui ont tenté d’évangéliser la population y ont été… très mal reçus !
Qui envoyer là-bas pour tenter d’y installer une ambassade ?
On sait que le Négus est malade, d’un mal inconnu.
Le choix ( de M. de Maillet ) se porte donc sur un jeune et pauvre apothicaire ( celui qui soigne avec succès le pacha du Caire ) : Jean-Baptiste Poncet, qui a un ami et collègue très cher : Juremi. Ce dernier est protestant, ce qui est fort mal vu à l’heure où le roi vient de révoquer l’Edit de Nantes !
En se rendant chez M. de Maillet qui l’a convoqué, Jean-Baptiste aperçoit ( pour la deuxième fois ) sa fille, Alix, dont il tombe éperdument amoureux. Au cours des nombreuses autres visites qui précéderont son départ, il devine qu’elle n’est pas indifférente à ses sentiments !
Aussi, il n’accepte de partir pour l’Abyssinie qu’avec un seul espoir : s’il réussit sa mission et revient ( il l’espère ! ) avec le grade d’ambassadeur, il pourra espérer demander sa main.
Pas si simple…
Déjà, on lui refuse la compagnie de Juremi.
Et son voyage, flanqué d’une impressionnante escorte, est semé de mille embûches…
L’Abyssin n’est pas le premier ouvrage de J.C. Rufin, mais c’est son premier roman.
Il deviendra vite un best-seller – mérité !
Le récit est en effet passionnant, documenté de façon étonnante, et rédigé ( dans le style du grand siècle finissant ! ) avec une truculence et un allant qui raviront le lecteur.
Médecin, neurologue, pionnier de Médecins sans frontières, Rufin connaît bien l’Afrique de l’Est, notamment l’Erythrée ( il y deviendra le directeur médical d’ACF ) et l’Ethiopie, où il rencontrera et épousera Azeb.
Sa connaissance du terrain lui permet de relater avec un réalisme stupéfiant l’odyssée de ce découvreur de l’Afrique, un bon siècle avant René Caillé et Livingstone !
Ses connaissances en histoire et en religion permettent au lecteur de se familiariser avec les luttes intestines des envoyés de Louis XIV en Afrique, où les Jésuites et les Capucins sont souvent rivaux. Le héros, catholique non pratiquant et très tolérant, doit user de mille ruses ( combats, fuites, déguisements ! ) pour parvenir à ses fins, sur le plan diplomatique… et sentimental !
Depuis la saga de Robert Merle ( Fortune de France et la suite ), aucun roman historique ne m’a autant bluffé. On a, pour le style de L’Abyssin, évoqué Diderot. J’y ajouterais volontiers Dumas pour les péripéties pleines de rebondissements !
Pour la petite histoire, nous avons eu la chance, Annette ( mon épouse ) et moi, de passer une semaine entière en Guadeloupe avec J.C. Rufin, son épouse et leurs deux filles, à l’occasion du Salon du Livre de Pointe-à-Pitre, en avril 2 000. A l’époque, il achevait la rédaction de Rouge Brésil, qui décrocherait le « vrai » Goncourt ( L’Abyssin a eu le… Prix Goncourt du premier roman ! ). Je ne sais plus si j’ai déjà fait une fiche sur Rouge Brésil, mais la lecture de L’Abyssin me laisse une impression grandiose.
Pour un coup d’essai, c’était un coup de maître – et l’avenir de J.C. Rufin serait assuré, aussi bien dans le domaine littéraire et médiatique que… diplomatique !
D’une certaine façon, ce sympathique Jean-Baptiste, herboriste confirmé et explorateur en herbe, est un double rêvé de Jean-Christophe !
Vous avez raté L’Abyssin à sa sortie, en 1997 ?
Quelle chance ! Vous allez pouvoir le découvrir, le dévorer et vous régaler !
Lu dans sa belle version d’origine, dans la Blanche.
CG
PHOTO prise le 15 avril 2000 au Salon du livre de Pointe à Pitre,
Déjeuner en tête à tête avec Jean-Christophe Rufin ( qui écrit Rouge Brésil ), son épouse et leurs deux filles.