et quand on sait, on répugne à agir ...
Le 17 janvier dernier, à 8 heures, sur la chaîne télé France Info, match théorique entre Bruno Servigne (l’auteur de Comment tout peut s’effondrer) et Laurent Alexandre (faux climatosceptique) sur le thème de la fin du monde, le premier étant baptisé (à tort) collapsologue et le second démontrant, chiffres à l’appui, que la situation de la population de la planète n’a cessé de s’améliorer depuis 1950. Ce qui n’est pas faux : moins de « pauvreté mondiale », amélioration du niveau de vie grâce à l’augmentation de l’exploitation des ressources planétaires…
Seulement voilà : aucune comparaison ne peut être établie entre ces deux constats – même si les affirmations de Laurent Alexandre devraient être sérieusement nuancées puisque, pour ne prendre que cet exemple, l’écart entre les riches et les pauvres ne cesse de se creuser !
Quant à l’exploitation des ressources de la planète, tous les voyants indiquent que ça va mieux qu’avant – le problème est de savoir… jusqu’à quand ?
Nous sommes sur le Titanic. Et tout va bien, même si les passagers se disputent pour avoir un peu plus de confort (que les autres, car la place sur le navire est réduite) dans leur cabine.
L’orchestre continue de jouer, la vitesse du navire ne cesse d’augmenter. Le problème, c’est l’iceberg qui se pointe à l’horizon et que personne ne veut voir.
Et quand on l’aperçoit, on est à peu près sûr qu’on trouvera un moyen de l’éviter – et puis même si on le heurte, qu’importe ? Le navire, on le sait, est insubmersible…
En 1972, le rapport du Club de Rome lançait la première alerte, en affirmant que sur le pan des ressources, les problèmes sérieux allaient se poser vers 2030 (et il n’était même pas encore question du réchauffement climatique !)
En 2020, les effets de ce changement se font sentir et les scientifiques sont tous d’accord pour assurer que les ressources vont effectivement manquer, ce qu’Alain Souchon avait d’ailleurs symboliquement résumé dans sa chanson On est foutus, on mange trop.
Nous sommes près de huit milliards d’humains sur une planète qui se vide… et se réchauffe.
Mais c’est encore très supportable, comme le pense la grenouille dans sa casserole qui continue de chauffer sans que ça l’inquiète trop… parce qu’elle s’habitue.
La vérité, c’est que, comme l’affirme François Gemenne dans son essai Atlas de l’anthropocène (dont un Télérama de janvier s’est fait l’écho dans son éditorial), il n’y a ni crise ni même transition : les changements sont globaux et irréversibles.
Et si l’humanité veut voir la température non pas baisser, mais cesser de monter dans deux ou trois siècles, c’est de toute urgence (et avant 2040) qu’il faut baisser drastiquement le niveau du CO2 – et envisager de réduire notre niveau de consommation énergétique – en le divisant… par six – ben oui !
Or, ce défi fait ricaner les économistes… et la majorité de la population des pays industrialisés.
Eh oui : qui est prêt à le faire ? Qui est prêt à admettre que c’est là le prix à payer pour que l’humanité perdure et que soit enrayé l’emballement climatique que nous avons déclenché ? Sûrement pas Laurent Alexandre, qui comme beaucoup préfère… attendre.
Aujourd’hui, affirme François Gemenne, la majorité de la population mondiale veut encore une société productiviste, de court terme, et se moque de la destruction du climat et de la biodiversité, il faut en être conscient.
CG